samedi 20 mai 2017

Tempête sur la Maison Blanche, Trump quitte le navire qui prend l'eau

Je n'ai pas pour habitude de relayer les dépêches de l'AFP, mais celle de ce matin tombée à 7h58 est incontournable. Elle décrit une Maison Blanche en pleine tempête, alors que son locataire le président-capitaine Trump quitte provisoirement son navire qui prend l'eau, pour sa première tournée présidentielle à l'étranger.

Voyez plutôt :

"Fin janvier, des jeunes recrues entraient à la Maison Blanche pleines d'enthousiasme et de fierté à l'idée de servir leur pays dans la nouvelle administration du président Donald Trump. Quatre mois plus tard, leur mission, censée être une expérience extraordinaire dont ils se vanteront un jour auprès de leurs petits-enfants, commence à ressembler davantage à un énorme boulet qu'ils traînent autour du cou.

En s'envolant vendredi pour son premier voyage à l'étranger, Donald Trump laisse derrière lui une Maison Blanche assiégée et des jeunes conseillers de plus en plus démoralisés. Mercredi soir, la nomination d'un procureur spécial pour enquêter sur les liens entre le cercle rapproché de Donald Trump et la Russie est tombée comme un coup de tonnerre. Sur une télévision accrochée au mur, les commentateurs des chaînes d'information lâchaient les mots de "collusion", "grand jury", "destitution", encaissés comme des coups de poing par des assistants du président muets et stupéfaits. Les employés du service de communication allaient et venaient de leurs bureaux en salles de réunion pour tenter de trouver une façon positive de présenter cette nomination qui pourrait bien rester comme une tache indélébile sur la présidence de Donald Trump.

Pendant des mois, ces employés de l'administration Trump ont vécu l'épuisement, les déchirements, les coups bas et l'atmosphère de crise perpétuelle de la Maison Blanche. Ce dernier développement - point d'orgue d'une semaine de tumultes d'une intensité que la Maison Blanche a rarement connu - s'est joué sous les regards du monde entier.

Les talents de meneur d'hommes de Donald Trump, vantés par certains, ne se sont pas exprimés à la Maison Blanche, où les coups en douce et les rumeurs quotidiennes de limogeage sont devenus la norme. En privé, les employés se plaignent de l'incompétence de l'administration et du sous-effectif. Les conseillers les plus juniors se demandent souvent s'ils vont pouvoir retourner à leur travail le lendemain, parfois avec le désir inavouable d'être enfin délivrés. D'autres disent qu'ils cherchent une porte de sortie ou qu'ils songent à prendre un avocat. Les républicains qui se sont vus demander s'ils étaient intéressés par un poste à la présidence se tiennent prudemment à distance.

Pour le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, ce désastre vire à l'humiliation publique. Tourné en ridicule par les humoristes, moqué par les correspondants de la Maison Blanche et presque rituellement contredit par le président, Sean Spicer a également dû supporter d'entendre ses collègues dire aux journalistes qu'il sera bientôt limogé.

Pour ceux de l'équipe Trump qui restent à Washington, la semaine prochaine offrira peut-être un répit."

On leur souhaite :-)

Fred Deion

samedi 13 mai 2017

Suisse vs UE : après le Brexit, le Suissexit ?

(article également publié sur le site http://lesakerfrancophone.fr/suisse-versus-union-europeenne-apres-le-brexit-le-suissexit et repris par http://free.niooz.fr/suisse-versus-union-europeenne-apres-le-brexit-le-suissexit-19290960.shtml, https://planetes360.fr/suisse-versus-union-europeenne-apres-brexit-suissexit/, http://lesobservateurs.ch/2017/06/15/suisse-versus-union-europeenne-apres-le-brexit-le-suissexit/, http://mailchi.mp/5fc5f2c7f2d6/communicationudc-gech?e=7bb0bb7594


Il peut paraître curieux de parler de Suissexit alors que la Confédération Helvétique ne fait pas partie de l'Union Européenne (UE). Bien que non-membre, la Suisse est cependant signataire des conventions de Schengen (suppression des contrôles aux frontières, mise en commun des politiques de visas et d'immigration) et de Dublin (droit d'asile européen). Elle a également conclu des accords bilatéraux avec Bruxelles, une première fois entre 1999 et 2002 (agriculture, libre circulation des personnes, marchés publics, obstacles au commerce, recherche, transport), et une deuxième fois entre 2002 et 2008 (environnement, fiscalité de l'épargne, lutte contre la fraude et la contrebande, produits agricoles transformés, pensions et retraites, éducation, statistiques, et coopération en matière de justice, sécurité, asile et migration, avec justement la signature des conventions de Schengen et de Dublin).

Dès l'entrée en vigueur de l'accord sur la libre circulation des personnes, l'immigration en provenance de l'UE augmente, en passant dans un premier temps à 50'000 habitants supplémentaires par an jusqu'en 2006, puis à 80'000 habitants supplémentaires par an dès 2007. Face à cet afflux, le parti UDC (Union démocratique du centre) lance une initiative populaire "contre l'immigration de masse" acceptée en votation le 9 février 2014 par 50,3% des voix.

Ce résultat modifie la Constitution fédérale avec les ajouts suivants :
"La Suisse gère de manière autonome l’immigration des étrangers.
Le nombre des autorisations délivrées pour le séjour des étrangers en Suisse est limité par des plafonds et des contingents annuels (...)
Les plafonds et les contingents annuels pour les étrangers exerçant une activité lucrative doivent être fixés en fonction des intérêts économiques globaux de la Suisse et dans le respect du principe de la préférence nationale (...)
La loi règle les modalités."

Pour préserver les bilatérales, le parlement vote cependant une loi d'application light le 16 décembre 2016 :
"Le Conseil fédéral arrête des mesures visant à épuiser le potentiel qu’offre la main d’oeuvre en Suisse. (...)
Lorsque certains groupes de profession, domaines d’activités ou régions économiques enregistrent un taux de chômage supérieur à la moyenne, il y a lieu de prendre des mesures limitées dans le temps visant à favoriser les personnes enregistrées auprès du service public de l’emploi en tant que demandeurs d’emploi. (...)
 Les postes vacants dans des groupes de profession, domaines d’activités ou régions économiques qui enregistrent un taux de chômage supérieur à la moyenne doivent être communiqués par les employeurs au service public de l’emploi"
Dans cette loi d'application light, il n'y a ni plafonds, ni contingents, ni principe de préférence nationale. L'UDC crie donc à la trahison, la volonté populaire étant bafouée, et la nouvelle disposition constitutionnelle n'étant pas mis en oeuvre.

La riposte ne se fait pas attendre : dès début 2017, un groupe de travail réunissant des membres de l'UDC et de l'ASIN (Association pour une Suisse indépendante et neutre) développent trois variantes en vue de lancer une nouvelle initiative populaire pour la restriction de la libre circulation. Le 4 mai 2017, l'UDC et l'ASIN rendent public ces trois variantes, qui sont examinées lors de l'assemblée générale de l'ASIN du 6 mai. Les voici :
  1.  résiliation de l'accord sur la libre circulation des personnes avec l'UE
  2. interdiction du principe de la libre circulation des personnes, et résiliation de l'accord y relatif
  3. interdiction du principe de la libre circulation des personnes, interdiction qui est prioritaire par rapport aux traités internationaux
Ces variantes seront examinées lors de l'assemblée des délégués de l'UDC le 24 juin, avec pour objectif de lancer une initiative populaire d'ici la fin de l'année. Cette initiative sera la première étape du Suissexit, car si elle est acceptée en votation populaire, l'UE risque bien de considérer qu'avec la résiliation d'un accord (libre circulation des personnes), c'est en fait tous les autres accords bilatéraux qui deviennent caducs (principe de la «clause guillotine»).

L'UDC va également déposer une deuxième initiative populaire, dite pour l'autodétermination ("le droit suisse au lieu de juges étrangers"). Elle vise à préserver notre liberté et notre indépendance de l'ingérence du droit étranger, en particulier européen, via sa reprise en raison d'accords internationaux (bilatérales, Schengen, Dublin, etc.). Si cette deuxième initiative est acceptée en votation populaire, ce sera la deuxième étape du Suissexit.

Une troisième votation est également à prévoir. En effet, l'Union européenne a adopté récemment une directive restreignant l'achat et la détention légale d'armes dans l'espace Schengen. La loi suisse sur les armes devrait donc être modifiée, la Suisse ayant signé la convention de Schengen et étant membre de cet espace depuis 2008 (au sujet de la pression mise par la Commission européenne dans le processus ayant conduit à l'adoption de cette directive : http://actufreddeion.blogspot.ch/2017/02/interview-de-la-deputee-europeenne-dita.html)

Cependant, cette nouvelle directive va à l'encontre aussi bien du service militaire obligatoire en vigueur dans l'armée suisse de milice (les soldats devant garder leur fusil d'assaut à leur domicile, entre deux cours de répétition), que de la tradition très populaire du tir sportif (la Fédération suisse de tir est la troisième plus grande association sportive avec 175'000 membres), sans parler de toutes les personnes résidant en Suisse qui s'adonnent au tir sans être affilié à un club (pour en savoir plus sur ce que prévoit cette nouvelle directive : http://actufreddeion.blogspot.ch/2016/12/nouvelle-directive-europeenne-sur-les.html)

Enfin et surtout, cette directive européenne criminalise les tireurs, chasseurs, collectionneurs et détenteurs d'armes, sans contribuer en quoique ce soit à la lutte contre les terroristes, qui utilisent soit des véhicules béliers (Nice, Berlin, Londres, Stockholm), des armes blanches (Magnanville, Wurtzbourg, St-Etienne-du-Rouvray) ou des armes achetées illégalement sur le marché noir, et pas légalement chez un armurier (attentats de Paris). Le seul effet de cette directive est donc de stigmatiser les détenteurs d'armes, de soupçonner toute la population, et de grossir les rangs des adversaires de l'Union européenne : mouvements qui s'opposent à cet "EU Gun ban" dans toute l'Europe, #iamthegunlobby, http://firearms-united.com/fr/. Ils s'ajoutent aux anti-Européens de tous bords, et aux partis politiques dits "populistes" qui font de la résistance à Bruxelles leur cheval de bataille prioritaire.

Bien que le parlement suisse n'ait pas encore adapté la loi suisse sur les armes à cette nouvelle directive européenne, la résistance s'organise déjà :
  • pétition en ligne, avec déjà près de 10'000 signatures : https://www.finger-weg-vom-schweizer-waffenrecht.ch/2017/04/offener-brief-an-den-bundesrat-nationalrat-staenderat/ 
  •  ProTell, association pour un droit libéral sur les armes et contre toutes restrictions de la possession d'armes par les citoyennes et citoyens responsables, a convoqué une assemblée générale extraordinaire le 17 juin. Le but ? Se mettre en ordre de bataille, en élisant un nouveau comité propre à défendre les droits et les libertés des tireurs.
  •  L'UDC (90'000 membres) a déjà annoncé qu'elle lancerait un référendum contre une nouvelle loi suisse sur les armes, si celle-ci reprenait les restrictions imposées par la nouvelle directive européenne (ce qui amènerait une votation populaire)
A l'occasion de ce référendum, si la population suisse rejette cette modification législative, et bien ce serait la troisième étape du Suissexit, la sortie de la Suisse de l'espace Schengen.

Fred Deion









samedi 6 mai 2017

Rapport de situation 2017 du Service de Renseignement de la Confédération

Le 2 février, j'avais publié un article intitulé : "Quelle est la menace ?". Je le concluais en indiquant que si le rapport de situation 2017 du Service de Renseignement de la Confédération (SRC) valait le détour, j'y reviendrais. Il vient de sortir, et contre toute attente, il mérite qu'on s'y attarde. Voici quelques extraits choisis :

"Les situations de crise régnant en Europe (...) ont depuis l'an dernier été renforcées (...). Les anciennes certitudes s'érodent ainsi davantage encore et sont remplacées par des incertitudes fondamentales ainsi que par une prévisibilité réduite (...). Une pression extraordinaire s'exerce donc sur l'ordre qui règne en Europe (...), qui commence ainsi à afficher des fractures marquées sous la pression de crises intérieures et extérieures.(...) La stabilisation durable du système financier européen à la suite des crises survenues depuis 2008 reste un chantier, avec une volonté politique toujours plus faible de trouver une solution à l'échelle européenne. Une maîtrise européenne globale des mouvements migratoires vers l'Europe (...) reste fragmentaire (...). Même si l'UE, l'euro, et le marché commun devaient survivre à cette longue crise européenne, plusieurs années de gestion politique et économique de la crise ont affecté la confiance (...). Dans les situations de crise aiguë, la suspension ou la rupture tacite des règles européennes est déjà devenue réalité. (...) La crise traversée par l'économie mondiale et les bouleversements politiques dans les régions critiques sur le plan de l'économie globale s'accompagnent de dysfonctionnements sur les marchés des matières premières, qui nous rappellent sans cesse la dépendance de notre société des importations de matières premières et d'énergie."

Les causes ? citons en vrac :
  • crise politique et économique de l'intégration européenne (Brexit, Grèce, etc.)
  • poursuite de l'instabilité financière, initiée depuis la crise bancaire de 2008
  • incertitudes sur la collaboration transatlantique depuis l'élection du président Trump
  • confrontation politique, économique, militaire entre l'Ouest et l'Est (réaffirmation du pouvoir russe, guerre civile en Ukraine) pouvant mener "à la constitution de zones d'influence concurrentes sur le continent européen"
  • "situations de crise dans les Etats situés sur les côtes orientale et méridionale de la Méditerranée" (conflit israélo-palestinien, Turquie, Syrie, Irak, "Etat islamique", Afrique du Nord et AQMI, avec toutes les menaces que font peser ces groupes terroristes)
  • conséquence du point précédent : hausse massive des mouvements migratoires avec infiltration de djihadistes mêlés au flux de réfugiés, et accroissement du danger terroriste qui en découle, comme l'illustre la multiplication des attentats en Europe. "Le risque que la lutte agressive de survie (de "l'Etat islamique") soit de plus en plus menée en Europe, est considérable. La vulnérabilité  physique et morale des sociétés libérales en Occident est élevée."
 Fred Deion

Lire le rapport de situation 2017 du SRC (rapport complet de 85 pages) : http://www.vbs.admin.ch/content/vbs-internet/fr/ueber-das-vbs/organisation-des-vbs/die-verwaltungseinheiten-des-vbs/-der-nachrichtendienst-des-bundes.download/vbs-internet/fr/documents/servicederenseignement/rapportsdesituation/NDB-Lagebericht-2017-f.pdf